En mai dernier, nous avons publié un article sur ce que nous savions jusqu’alors du projet secret de cryptomonnaie de Facebook, le Libra.
Libra est un projet de cryptomonnaie initié par Facebook et rejoint par 28 grandes entreprises (tels que Spotify et Uber) et ONG organisé en fondation sans but lucratif, basée à Genève dont Facebook ne sera qu’une des organisations partenaires. L’objectif annoncé de ce projet est de résoudre les problèmes des cryptomonnaies actuelles avec des frais de transaction faible, des capacités importantes de volumes de transactions et une valeur monétaire basée sur une réserve d’actifs financiers. Ainsi, Libra souhaite permettre l’accès simple à une monnaie stable dans les pays émergents où la majorité des habitants ne disposent pas de compte en banque.
Où en est-on aujourd’hui ?
Depuis l’annonce de son lancement, Libra est en train de traverser une période mouvementée entre tracas politiques et réticences de ses partenaires.
Contre-poussée réglementaire
Les régulateurs pourraient bien retarder le lancement du Libra de Facebook, préoccupés par l’influence sociétale déjà considérable de ce géant des réseaux sociaux. Ils craignent également que la cryptomonnaie ne soit sujette à la fraude, au blanchiment d’argent et ne cause des dommages aux devises fiduciaire et souveraine d’aujourd’hui et à leurs systèmes monétaires sous-jacents.
Le ministre français de l’Économie et des Finances Bruno Le Maire a menacé de bloquer le développement du Libra au sein de l’UE en disant que cela menace la « souveraineté monétaire ». Il a aussi suggéré que l’Europe devrait elle même envisager de lancer sa propre monnaie numérique.
L’Allemagne lutte contre le potentiel des entreprises privées, comme Facebook, a pouvoir lancer leur propre monnaie. Son ministre des Finances a déclaré qu’il rejetterait une « monnaie parallèle » comme le Libra.
Cependant, la Suisse semble garder un esprit plus « ouvert » sur le projet tant qu’il s’opère avec transparence et dans le respect d’une réglementation équivalente.
Un comité du Groupe des Sept (G7) a présenté ses recommandations sur les stablecoins. Le comité a déclaré que les stablecoins, comme celui de Libra, présente un risque important au système financier mondial, mais que cependant, il existe un potentiel en terme de paiement.
En dehors de l’Europe, les banques américaines, membres du Conseil consultatif fédéral (Federal Advisory Council, FAC), ont averti que Libra en tant que cryptomonnaie pourrait créer un système de « finance fantôme » en dehors des marchés réglementés, réduisant la liquidité et menaçant les modèles de paiement traditionnels et la politique monétaire.
Les partenaires financiers du projet Libra hésitent
En septembre, il est apparu que PayPal était prudent vis-à-vis du projet, suite à des rumeurs de retraits potentiels. Gabrielle Rabinovitch, vice-présidente des Relations Investisseurs, a qualifié l’adhésion de PayPal au consortium de « non contraignante » :
« Évidemment, je pense qu’il y a beaucoup de travail à faire avant d’en arriver au point où cela [le Libra] devient quelque chose de plus qu’une idée très excitante. »
Malgré cela, PayPal a quitté le consortium de Libra, tout comme Visa, Mastercard, eBay, Stripe et d’autres.
La première réunion officielle de la Libra Association a eu lieu le 14 octobre à Genève. 21 de ses 28 membres initiaux ont signé un consortium de gestion de la devise. Selon Facebook, 1 500 organisations ont manifesté leur intérêt à se joindre à l’organisme et 180 d’entre elles répondent aux critères d’admissibilité. Cela pourrait aider Facebook à atteindre un objectif de 100 membres avant un lancement prévu vers la fin de 2020.
Une analyse de la blockchain de Libra permettra-t-elle de faire le point sur les débats en cours ?
The Blockchain Xdev, société spécialisée dans le conseil technologique et le développement de solutions blockchain, basée à Paris, a publié une analyse de la technologie sous-jacente à la cryptomonnaie Libra.
L’objectif de cette étude est de dresser une analyse technique synthétique de la technologie sous-jacente à la cryptomonnaie LIBRA et plus précisément de lister les principaux risques relatifs au choix d’architecture et des technologies adoptées par le projet.
Retrouvez l’ensemble de l’étude ici.
L’analyse des risques ci-dessous est conduit suivants les principaux critères d’évaluation d’une technologie Blockchain à savoir :
- La gouvernance : modalité de gestion des conditions d’accès, d’utilisation et d’évolution du LIBRA par ses utilisateurs et membres
- La performance : capacité en nombre de transaction par seconde
- La confidentialité : capacité à garantir la confidentialité des données des transactions à caractère personnel ou sensible
- La gestion de l’identité : gestion de l’anonymat des utilisateurs
- La sécurité : mécanismes de protection contre les attaques informatiques
- La maturité : stabilité et fiabilité du système au cours du temps. Retour d’expérience sur les technologies employés.
Analyse des risques
Les résultats de l’étude
D’un point du vue technique, le projet Libra concentre les choix d’architecture les plus pertinent lui permettant de répondre aux principaux enjeux d’une cryptomonnaie d’un point de vue de la performance et de sécurité associé à des mécanismes de gouvernance solides favorisant une large adoption par l’ensemble des utilisateurs.
On peut cependant relever une conception qui à ce jour ne permet pas de garantir la confidentialité des transactions manipulants des données à caractère personnel ou sensible.
Enfin, la relative maturité de certaines technologies adoptée a de fort risques d’induire son lot de défaillances techniques aux conséquences plus ou moins graves lors de sa phase de déploiement.
En conclusion
L’objectif était de donner un point de vue technologique sur les aspects clés du projet, tels que la gestion et la confidentialité des données, et la gouvernance. Ce faisant, cela nous permettra d’avoir un premier aperçu de la solution blockchain du Libra, qui, à son tour, peut nous éclairer sur les questions actuellement mises en avant par les régulateurs.
Pour ce qui est de la résistance réglementaire, elle s’est avérée impressionnante et efficace. Mais rien de tout cela ne signifie que des stablecoins ou des projets similaires ne pourront jamais décoller. Tout porte à croire que les gouvernements devront les adopter – ou leur faire concurrence. La semaine dernière, Rob Kaplan, président de la Banque fédérale de réserve de Dallas, a déclaré que tôt ou tard, « quelqu’un va trouver comment faire fonctionner tout ça ».
Les choses restent chaotiques pour la première phase du Libra, mais il est indéniable qu’il a été un moteur, stimulant le débat international sur le sujet et suscitant l’intérêt des entreprises pour la monnaie numérique.
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